Un coin à soi – Romina Rinaldi

Un coin à soi
Romina Rinaldi
« C’est le résident qui donne le rythme selon ses besoins »
Rédaction : Romina Rinaldi, Photographie : Jérôme Cambier
Romina Rinaldi est orthopédagogue à la MSP Bois de la Fontaine au Centre Psychiatrique Saint-Bernard. Partons à la découverte de cette collègue dynamique et souriante qui a plus d’une corde à son arc : professeur de psychologie à l’UMONS, auteure de plusieurs livres, jeune maman…
« Durant mes stages de dernière année en logopédie, j’ai eu l’occasion de pratiquer dans un hôpital psychiatrique et cela a été une vraie révélation pour moi. C’est là qu’a démarré mon intérêt pour les troubles psychotiques et, dès mon entrée en bachelier en psychologie, je savais que c’est vers la psychiatrie adulte que je souhaitais me diriger. »
Premiers contacts
En 2015, Romina est à l’Université de Mons pour y faire sa thèse (Action orientée vers un but et traitement de l’information contextuelle dans le cadre de la schizophrénie : vers une approche intégrative des déficits). C’est à ce moment-là qu’elle découvre le CP St-Bernard. « Cela fait un moment que je m’y ballade. Les équipes de Saint-Bernard m’ont beaucoup aidée durant la collecte des données de ma thèse, j’avais fini par presque m’y installer. C’est comme ça que j’ai eu mes premiers contacts avec la MSP Bois de la Fontaine. Certains de ces contacts se sont prolongés en dehors de l’hôpital après ma thèse. On continuait à se rencontrer lors de réunions ou de projets. »
Mon travail consiste à permettre à la personne de prendre une part active dans son projet, à pouvoir exprimer ses besoins, à mieux se connaître et à trouver les ressources pour atteindre des objectifs
L’autodétermination
A la naissance de sa fille, elle a rejoint le service d’orthopédagogie clinique de l’UMONS pour travailler sur des projets de recherche appliquée autour du thème de l’autodétermination chez les adultes avec déficience intellectuelle. Certains ont été clôturés depuis et finalement, elle est arrivée au CP St-Bernard il y a deux ans. « Je suis orthopédagogue au sein de la MSP Bois de la Fontaine mais ça ne doit sans doute pas parler à énormément de monde. L’orthopédagogie est une discipline entre les sciences psychologiques et les sciences de l’éducation. L’objectif est d’apporter une vision de la personne et un accompagnement qui tiennent compte des difficultés mais aussi des ressources et du potentiel d’apprentissage de la personne. Dans le travail, on intègre alors la personne elle-même mais on travaille souvent aussi sur le milieu dans lequel elle évolue, auprès des professionnels qui l’accompagnent, de sa famille aussi… pour faire évoluer son projet à court et moyen terme et viser la qualité de vie. Mon travail consiste à permettre à la personne de prendre une part active dans son projet, à pouvoir exprimer ses besoins, à mieux se connaître et à trouver les ressources pour atteindre des objectifs (petits et grands). Pour aider les personnes à aller vers plus d’autodétermination, il y a tout un travail de connaissance de soi, d’estime de soi aussi, à réaliser. Par ailleurs, lorsqu’il existe des problèmes, de comportement notamment, l’orthopédagogue va pouvoir mener une analyse fonctionnelle des facteurs qui peuvent maintenir ces problèmes. Il va alors envisager les « difficultés » de la personne (ex. les symptômes de sa pathologie) mais aussi toutes les variables contextuelles (ex. organisation du temps, format de l’information qui est donnée à la personne, canaux de communication utilisés, sources de renforcement, etc.) afin d’avoir un état des lieux des facteurs biologiques, psychologiques et sociaux qui peuvent faire émerger les comportements problématiques. »
Missions complémentaires
« J’essaie d’apporter cette vision complémentaire de la personne et à ce titre, je suis souvent amenée à travailler avec mes collègues assistantes sociales dans des projets liés notamment aux familles ou à des aspects de travail de l’autonomie. Nos missions sont complémentaires. L’idée est vraiment de partir de ce qui est important et qui fait sens pour la personne pour l’aider, avec le reste des membres de la MSP, à penser et mettre en place son projet, étape par étape, avec l’accompagnement plus psychoaffectif et comportemental que cela implique de mon côté. Enfin, adapter les supports et la façon de communiquer, ainsi que les hypothèses, en fonction de la présence d’un trouble neurodéveloppemental fait aussi partie de mes missions. A la MSP, le projet individualisé est un de nos outils et, actuellement, nous sommes en train de travailler en équipe sur un support qui pourrait permettre à chacun (même les personnes moins verbales), dès l’admission, de définir ses besoins, les domaines de sa vie importante et de commencer à élaborer un projet qui pourrait être réactualisé selon les réorientations d’une MSP à l’autre par exemple. »
Demandes à plusieurs niveaux
Au sein de la MSP, Romina accompagne certains résidents individuellement, co-anime aussi des groupes d’expression et participe aux réunions pluridisciplinaires. Elle participe aussi aux préadmissions, aux entretiens familiaux et aux concertations avec les professionnels du réseau.
A priori, tous les résidents peuvent être amenés à la rencontrer. Elle fonctionne avec des suivis « habituels » et à la demande de la personne elle-même ou de l’équipe. « Il y a vraiment des demandes à plusieurs niveaux et toutes n’aboutissent pas au même type de suivi. Parfois c’est une mise au point, parfois un soutien temporaire, et puis aussi des suivis sur du plus long terme aussi. C’est le résident qui donne le rythme selon ses besoins. »
Je suis touchée par les personnes que je rencontre, par leur histoire et surtout, leur humanité et leur vision des choses
Richesse
« Ce travail m’apporte énormément ! Il me passionne car il se fait dans la rencontre, avec toute la part de complexité et la richesse que cela implique. Je suis touchée par les personnes que je rencontre, par leur histoire et surtout, leur humanité et leur vision des choses. Et puis, j’ai la chance de travailler avec des collègues présents et à l’écoute qui m’apprennent beaucoup. »
Auteure prolixe, Romina aime écrire depuis toujours. « Sur mon temps libre depuis la fin de ma thèse, j’ai travaillé comme pigiste pour le magazine Sciences Humaines. C’est une expérience qui m’a aidée à écrire sur ce que je voulais. Elle m’a donné la marge nécessaire pour être à l’aise d’écrire quand j’en avais envie ou besoin. »
Inspiration
En plus de ces projets de recherches, de ses publications et de son travail au CP St-Bernard, Romina donne également des cours à la Faculté de Psychologie à l’UMONS. Ces activités différentes se nourrissent les unes les autres. « Mon travail en MSP apporte autant à la recherche et aux cours que l’inverse. Je pense que ma pratique clinique au CP St-Bernard donne de la substance à mes cours. Et puis, en pratiquant, certaines questions vont se poser et c’est l’occasion d’orienter des recherches là-dessus. Et de façon réciproque, ces activités me donnent du temps pour me tenir à jour au niveau scientifique et je pense que cela fait évoluer ma pratique clinique.
Mes différentes « casquettes » finissent souvent par se rejoindre plus ou moins donc ce n’est pas trop difficile. Par contre, il est certain que cela me demande souvent de travailler sans compter mes heures… ce que je ne ferais sans doute pas si c’était une obligation. J’ai beaucoup de chance de faire un travail passionnant et varié et c’est sans doute de là que je tire mon inspiration et mon énergie. »
Qui est Romina Rinaldi?
- Romina a 33 ans et est maman d’une petite fille de 3 ans.
- Elle a un chow-chow de 7 ans.
- Elle est curieuse de nature.
- Pendant le confinement, elle a appris à jouer du ukulélé.
- Elle pratique l’humour et l’autodérision sans compter.
- Elle aime par-dessus tout passer du temps avec ses amis et sa famille.